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  • La terre sous les ailes blanches  Уладзімір Караткевіч

    La terre sous les ailes blanches

    Уладзімір Караткевіч

    Выдавец: Юнацтва
    Памер: 207с.
    Мінск 1981
    99.95 МБ
    Apparaissent des “volontaires de la liberté”. Parmi eux la figure d’Alexandre Savitski (1888—1909) est particulièrement remarquable. Il avait été exclu d’un lycée pour ses idées révolutionnaires. En 1905 il prend une part active à la révolution, dif­fuse des oeuvres révolutionnaires; à Mogui­lev il appelle à prendre d’assaut la prison de la ville, à Minsk il participe aux mani­festations, à Tchernigov il organise un club d’ouvriers. Après l’échec de la révolution, quand les révolutionnaires entrent dans la clandestinité, quand le mouvement gréviste
    s’affaiblit et les troubles des paysans s’apai­sent, quand commence la réaction de Stolypine, Savitski choisit la voie de la lutte des “partisans”. Au lycée déjà on le savait être un acteur de grand talent qui pouvait incar­ner n’importe quel personnage: un paysan, un noble, un commerçant juif (en plus de la langue biélorusse et de plusieurs langues européennes il possédait admirablement bien le polonais, l’yiddish, le russe, l’ukrai­nien. Il possédait de multiples talents: peintre, poète (auteur de la “Fée du prin­temps”), mais, avant tout, comme nous venons de le dire, il était acteur.
    Il forme un détachement de 200 hommes qu’il divise en plusieurs petits groupes bien disciplinés: “Tous pour un... Ne jamais se rendre... Si quelqu’un est pris il faut ab­solument le libérer même au prix de la mort tous les autres... Ne jamais donner les noms des amis ni le sien... Aller à la potence en insultant l’ennemi... Ne jamais faire couler le sang innocent.” Tels étaient les princi­paux articles des statuts de ce détachement. Les statuts avaient été rédigés par Savitski.
    Il avait des amis partout. Il apprenait toujours à l’avance les rafles et les expé­ditions en préparation contre son détache­ment. Il attaquait les grosses propriétés et les banques et distribuait l’argent aux pauv­res paysans, aux chômeurs, aux sans abri, aux sans chevaux. Il envoyait des tracts aux oppresseurs trop cruels, et, s’ils ne se calmaient pas, la vengeance ne se faisait pas attendre. Mais, le plus souvent, après un ou deux avertissements pareils il n’y avait per­sonne qui ne fît preuve de tendresse envers les pauvres.
    Les activités de Savitski se déroulaient dans le gouvernement de Moguilev (arron­dissements de Tchérikov, Tchaoussy, Gorki, Klimovitchi, Gomel et autres), près de Novozybkov, Mgline, Starodoub, au nord de Tchernigov. Il se présentait aux bals dans l’habit de chef de la police; déguisé en vieille femme il aidait la police à rechercher Sa­vitski (lui-même) à la foire de Gomel. Il
    faisait Uh voyage en chemin dé fer ayant pris l’aspect d’un évêque et, en passant à travers la Polésie, il donne sa bénédiction au chef de la gendarme, >e, à un général et à une foule de fonctionnaires. Il aide la veuve d’un gendarme mort en coinbattant contre son détachement, parce que les paysans voulaient la chasser de sa terre. Sur un ter­ritoire de quatre cents kilomètres de dia­mètre, de l’Ukraine à Orcha, on tremblait rien qu’en entendant son nom et on bénissait ce nom, pendant quatre ans. Personne, ni les hobereaux, ni les gendarmes, n’osaient faire le moindre mal aux pauvres. A la Douma d’Etat on adresse au tsar la question suivante: “Quand Sa Majesté voudra-t-elle mettre fin aux activités de ce Sélimsultan biélorusse?” Mais la police et l’armée locales n’avaient guère envie d’avoir affaire à lui. Il était légendaire, un preux des temps nou­veaux. Alors on promet une prime de mille roubles à celui qui indiquerait où il se cache. En même temps on fait venir du Caucase “la division sauvage”.
    Atteint de la malaria Savitski (avec deux de ses camarades) se cache dans la grange d’un paysan du village de Krasnoé (à dix kilomètres de Gomel). Mais quelqu’un le dénonce. Les soldats de la “division sauva­ge” cernent la grange. La fusillade dure toute la nuit, le matin Savitski et ses compagnons reçoivent de l’aide. Alors ils décident de for­cer l’encerclement. Et ils y réussisent. Mais à la lisière de la forêt l’aide de Savitski, l’ouvrier Kalouguine, est tué. Ses camara­des s’attardent en portant son corps et ils sont criblés de balles. C’était le 25 mars 1909.
    CHANSONS NOUVELLES
    D’UNE AUBE NOUVELLE
    La littérature nationale biélorusse a été projetée en avant par la vague révolutionnaire. Maintenant, on ne peut plus rien arrêter, malgré la fermeture, en 1907, des clubs, des salles de lecture, des cercles qui étaient ap­
    parus pendant la révolution. On ne peut rien y faire, même pendant les années de la réac­tion.
    Parmi les poètes de ces années la place d’honneur est occupée par Tiotka —• Alaïse Pachkiévitch-Keiryss (1876—1916). Péda­gogue, socialiste, auteur de vers ardents pour la défense du peuple, vers qui sont peutêtre encore un peu déclaratifs, mais sincères, militants, convaincus, Toute sa vie elle lutte contre la grande injustice. Ses armes ce sont la chanson et la propagande:
    Ecoutez la fanfare, oh mes frères,
    Elle sonne là-bas, à l’est de chez nous;
    Ecoutez les oiseaux là-haut dans les airs, Ils chantent la fin de la vie à genoux. Libertél C’est un mot merveilleux!
    Il nous unit tous dans un même élan,
    L’épouse envoie son homme dans le feu, La mère est prête à donner son enfant.
    Fuyant la police, elle s’installe à Lvov (alors Autriche-Hongrie) et là-bas publie des recueils de vers —“La fin de la liberté” et “Le violon biélorusse”— puis „Premières lectures pour les petits Biélorusses” qui est le premier recueil de morceaux choisis en langue maternelle. La poétesse meurt dans la plénitude de ses forces, d’une maladie subite.
    L’année 1905 octroie aux poètes la pos­sibilité de publier leurs oeuvres. Les jour­naux “Nacha niva” (Notre champ) et “Nacha dolia” (Notre destin) commencent à paraître; on édite également des livres, des almanachs, des calendriers.
    La maturité de la littérature, sa sortie sur la route royale, sont avant tout liées aux noms de Yanka Koupala (1882—1942) et de Yakoub Kolass (1882—1956).
    Koupala est un des sommets de la poésie biélorusse. Pas seulement grâce à son génie, mais aussi parce que, comme Bogouchévitch, il a toujours été avec le peuple, il a pleine­ment exprimé le caractère, l’âme, les voeux de ce peuple; il est sorti du peuple et il y est retourné avec toute son oeuvre.
    Le principal de ce qui a influencé l’oeu­vre de Koupala, c’est la chanson populaire biélorusse, les légendes, la vie réelle de la Biélorussie. Son père est un pauvre fermier; leur maison est située non loin de Minsk, c’est une maison comme toutes les autres, avec des carpettes et des serviettes déco­ratives, comme celle qui a été reconstruite à Viazynka; il lit beaucoup; c’est un auto­didacte. Son premier vers —,,Le paysan”— représente le programme de toute sa vie. Son premier recueil—,,La flûte”—est véridi­que et tragique à la fois; c’est pour ça qu’il est interdit par le pouvoir.
    J’entends les loups hurler, j’entends le vent
    souffler, J’entends des chants d’oiseaux, j’entends des airs vibrer;
    Je vois tout mon pays — des champs, des bois, des prés, C’est ma Biélorussie, c’est ma terre sacrée.
    C’est cette terre où le poète voit des hom­mes porter ‘‘le poids de l’injustice” pour le montrer au monde entier, parce qu’ils veulent „être des Hommes”. C’est pour eux que le poète chante:
    Ma chanson n’est pas née dans les fleurs
    Au soleil éternel du midi, Elle est née dans les prés tout en pleurs Sous un ciel sans couleurs et la pluie.
    Ma chanson ne peut être payée en pièces d’or, Et jamais son destin ne pourra m’accuser;
    Elle est née pour servir son pays, et encore, Elle ne veut que chanter pour les coeurs
    des damnés-
    Ce qu’elle veut c’est chanter jusqu’au jour qui viendra
    Réveiller les villes, les villages et les bourgs, Elle veut voir sous un ciel qui resplendira
    Toute la Biélorussie, heureuse pour toujours.
    Il hait tous les oppresseurs du peuple, du tsar jusqu’au dernier des policiers...
    Tiotka — Alaise Pachkévitch
    Levez-vous pour chasser le tyran, Arrêtez cette main d’assassin!
    Levez-vous! Le pays qui souffre tant
    Vous attend vos armes à la main.
    Un amour profond et sans partage pour le peuple caractérise le poète et toute son oeuvre. On le voit dans le poème „Le Kourgane” où un joueur de gusli chante à un prince-vampire toute la vérité de lui et qui, pour ça, est enterré vivant. On le voit également dans une de ses oeuvres la plus slave, d’une audacieuse gaîté tout à fait païenne, „Elle et moi”... On le voit dans la comédie mordante, pleine de finesse et qui
    fait vraiment rire, “Pavlinka”, ou dans la dure sagesse d’un drame consacré au destin de paysans chassés de leur terre, ,,Le nid défait”.
    Koupala, après Bogouchévitch, a réalisé une des choses les plusimportantes: il a ajouté un jet d’eau pure à la source de la poésie populaire. Sa poésie à lui.
    Personnellement, je ne l’ai vu qu’une fois dans ma vie, quand j’étais encore enfant; mais toute ma vie je vois et je parle à ceux qui lui étaient proches, qui ont été modelés par sa poésie, dans le sens concret du mot. Tout l’exemple de sa vie a, pour ainsi dire, ajouté de la grandeur à son temps. Quand on parle à un instituteur qui l’a connu, à un paysan qu’il a aidé, on ne peut ne pas penser que ce sont des hommes vraiment remar­quables dans leur honnêteté et leur gran­deur.
    Le théâtre existe là où il y a des pièces à jouer. C’est à ce moment qu’apparaissent les théâtres ambulants et les théâtres à scènes permanentes; les troupes sont des troupes d’amateurs quant à leur composition, mais ce sont des professionnels quant à leur talent. Le fondateur d’une de ces trou­pes, Ignace Bouïnitski, a voyagé avec son petit théâtre à travers toute la Biélorussie, il a joué dans presque toutes les villes, les petites bourgades et les villages. La musique et la peinture continuent également à se développer.
    Koupala avait un ami, un frère d’armes, poète militant comme lui,— Yakoub Kolass. Originaire de la Polésie, il atteint les som­mets de l’instruction parce que dans cette famille de paysans on aime les livres, les chansons et le folklore plus que n’importe où.