• Газеты, часопісы і г.д.
  • Nouvelles d'auteurs biélorusses

    Nouvelles d'auteurs biélorusses


    Выдавец: Мастацкая літаратура
    Памер: 405с.
    Мінск 1977
    76.4 МБ
    Nous sommes au milieu de ses vacances et je lui dis: «Ne nous fais pas honte, canaille. Va et agenouille-toi devant celui qu’il faut. Que tout soit en ordre!» Son visage s’est couvert de taches. Il est plus haut que moi de deux têtes. 11 me regarde presque du plafond et me dit tranquil­lement: «Je n’irai pas, père... Je ne pourrai errer
    toute ma vie entre les pupitres en monument vi­vant. Mes mains ont besoin d’un travail...»
    Là, je me suis démené. 11 aurait fallu tout peser, tout ruminer... C’est non sans raison qu’on dit: celui qui se noie, s’accroche à un brin de paille. Je me suis souvenu d’un de mes anciens amis. Un ami de guerre. Maintenant il est directeur d’une école radiotechnique près de Moscou. Je lui ai écrit une lettre, je l’ai donnée à mon étudiant et... adieu. Va et n’embête, ni moi, ni personne d’autre...
    Tu crois, que cela a eu son effet? Il a tenu jus­qu’au printemps, tout juste. Après j’ai tout ap­pris de ses lettres. «Je n’aurais jamais cru que je me trouverais là où vous m’avez fourré, pleuraitil Je suis au fond du désespoir. Un jour j’ai erré au bord d’une rivière et j’ai beaucoup regretté qu’elle était encore couverte de glace...» Puis il recommence, en larmes: «J’aurais préféré faire les gros ouvrages, et moi je suis avec ces boutons et ces bobines. Je ne peux pas les saisir, ils se perdent entre mes doigts.» Et presque dans chaque lettre il transmet ses salutations à Paramon.
    Je n’en savais rien. Tout ce qu’il écrivait, ma femme me le racontait. Je croyais que tout était réglé. Une fois je rentre tard du district, mouillé jusqu’aux os, gelé. Je tape du pied dans la salle d’entrée, je me secoue et je vois ma femme accourir à ma rencontre: «Silence, tu vas ré­veiller Svetsik...» Je n’ai pas compris tout de suite: quel Svetsik? Je me penche sur ce cana­pé, je vois notre fils. Déjà à la maison. Couché, il fait un petit somme, fatigué après la route, no­tre chéri...
    Le lendemain matin, sans rien dire, je vais trouver le chef d’équipe. «Prends mon fils chez toi! Donne-lui du travail. Tu entends? Tu le met­tras là où le travail sera le plus dur. 11 aime beau­
    coup le travail!.. «Et qu’est-ce que j’ai pu lui faire encore? Il avait sué sang et eau autrefois, avec ce chariot, mon cosmonaute!..
    Andrey Danilavitch se leva du canapé avec un mauvais rire, approcha ses bottes et roula un morceau de toile autour de sa jambe.
    — Et qu’est-ce qu’il est devenu après?
    — Et qu’est-ce qu’il lui restait à faire? fit Andrey Danilavitch avec mépris. En automne il est entré dans une école de mécanisation. Il a appris la science maligne de conduire un tracteur. Et par-dessus le marché, à sa grande joie, de conduire une machine combinée. Il a reçu son diplôme... Tout de suite après l’école il est parti aux terres vierges, faire la récolte. Après son re­tour il s’est acheté ce «bouc». 11 a roulé, il fait du bruit, et maintenant, le voilà, il l’attend...
    — Quoi, est-ce qu’il n’est pas là?
    — Le cavalier fait son service. Voilà déjà deux ans. Tankiste-mécanicien...
    S’étant chaussé, Andrey Danilavitch resta une minute assis, ses mains sur ses genoux:
    — Bref, c’est très gai. Ce n’est pas une vie, ça, mais une série de distractions. N’est-ce pas? Qu’est-ce que tu as à dire?
    Je souris et haussai les épaules.
    — Voilà, il secoua la tête, triste et blessé. Il n’y a rien à dire. Quand je raconte ça, tous font la même chose; ils haussent les épaules et rient sous cape. Mais moi, j’ai tout ça au fond du coeur. Imagine-to i un peu... Fedzka! Le même Fedzka, fils d’une basse-courière, que sera-t-il? Un ingénieur. Après il pourra devenir un construc­teur. Et mon fils?.. Il fera tourner des écrous? Il chauffera le carter gelé avec du mazout? Sviéta-zar!..
    Ivan Navoumenka
    ooo
    JULES VERNE
    I
    Depuis ma plus tendre enfance j’aime tout ce qui est fantastique et mystérieux. Tous les enfants, véritables diablotins, après avoir touché leurs cinq ans, voudraient voir le monde sens dessus dessous. L’extraordinaire attire l’enfant quand il est encore au berceau. Les pères d’aujourd’hui peu­vent facilement s’assurer de la véracité de ce que je viens de dire. Par exemple, le petit bonhomme aux yeux bleus est dans son berceau; il sait ce que c’est que le printemps, l’été, l’automne, mais il ne connaît pas encore l’hiver. Approche-toi de lui, dis-lui bonjour, appelle-le par son nom; aucun effet. Mais si tu enfles tes joues, si tu fais de gros yeux, et si, de plus, tu fais claquer ta langue, tu verras l’émerveillement du petit être aux yeux bleus.
    L’aspiration à l’extraordinaire, au merveil­leux provient, évidemment, de la nature même de l’homme. A trois ans le même petit bonhomme sera au comble du bonheur s’il voit son père changer de position, se mettre à quatre pattes pour res­
    sembler à nos ancêtres éloignés. Il le suivra jus­qu’au bout du inonde. Il oubliera le bonbon qu’il vient d’obtenir après toute une heure d’attente larmoyante, il oubliera même son cheval vert qui hennit debout sur ses roues de bois. Cela ne lui arrive pas souvent de voir son papa, cet être si bien connu et tellemet ordinaire, se mettre à quatre pattes et aller avec son fils ex­plorer les coins les plus mystérieux de la maison. Et puis, on peut aussi grimper sur le dos de papa qui devient, immédiatement un cheval galopant d’un coin à l’autre de la place, il suffit seulement de l'éperonner de toutes ses forces...
    Quand le fils a sept ans, qu’est-ce qui peut rem­placer les belles histoires? 11 n’est pas obligato­ire de savoir la version exacte des contes d’Afanassiev ou des frères Grimm. Il faut tout simple­ment mettre dans un même panier des loups, une vieille sorcière, Gros Jean que la fortune comble toujours. L’essentiel, c’est que la fin du conte n’arrive pas trop vite. Les petits yeux ronds de l’enfant regardent sans sourciller et la petite poitrine de moineau de l’être enchanté se soulève et s’abaisse au rythme des aventures merveil­leuses.
    Le mystérieux attire. On éprouve un désir ir­résistible de soulever le rideau de l’inconnu, de pénétrer dans le fond des choses. C’est peut être pour ça que les jouets du fils ne durent pas long­temps. Tu lui achètes une auto, d’un modèle les plus récents, qu’on peut mettre en marche avec une clé et qui tournera dans la chambre au­tant que tu voudras, et, un jour après, l’auto est démontée et n’intéresse plus le petit. Sa curiosité est satisfaite. Tout simplement, l’enfant avait voulu voir ce qu’il y avait dedans. Il croyait qu’il y avait un petit bonhomme qui tournait ces vis et les roues. Iln’ya qu’un ressort. Le petit
    chien d’argile, qui peut siffler si on souffle par un petit trou, dure encore moins que l’auto. Après avoir sifflé à coeur joie une journée entière le fils le casse vers la soirée avec un marteau. Offensé, il est sur le point de pleurer: il avait cru y trouver quelque chose d’extraordinaire et il n’y a trouvé que du vide.
    II
    Dans mon enfance j’étais maladif et je craignais fort le froid. Ceci donnait la supériorité totale à mon voisin Kiryl, un robuste garni 11 à joues roses, qui, en hiver, courait, la pelisse déboutonnée et apaisait sa soif avec un morceau de glace. Il ron­geait la glace comme un morceau de sucre, et moi, je tremblais à le voir. 11 me semblait que Kiryl allait tomber malade. Mais aucune maladie ne le prenait. Du matin au soir, il se démenait sur la rivière couverte de glace, ses patins de bois ferrés aux pieds; on aurait pu dire qu’il pouvait y passer la nuit.
    Mais le soir Kiryl devait rentrer chez lui bon gré, mal gré. Tout d’abord, il fallait man­ger un morceau. Si bonne que soit la glace bleue, aux bulles gelées semblables à des yeux argentés, sans pommes de terre, le ventre de Kiryl lui faisait mal et gargouillait, tandis que ses pieds commençaient à se raidir. Outre cela, Kiryl craignait sa mère. Elle le réprimandait surtout pour ses souliers. Il était évident qu’une paire de souliers ne suffisait pas à Kiryl pour passer l’hiver, et c’est pourquoi, chaque soir, le gamin avait des mal-entendus avec sa mère.
    Une fois sa mère avait caché ses souliers. Alors Kiryl sortit pieds nus sur la glace. H avait les pieds rouges comme des pattes d’oie. Pendant toute une heure les habitants de la rue, bouche
    bée, regardèrent ce spectacle, jamais vu jusque là. A l’étonnement de tout le monde, Kiryl ne tomba pas malade après ce patinage à pieds nus.
    11 ne s’adonnait pas aux études et ne perdait pas beaucoup de temps à faire ses devoirs. Il avait toujours des heures entières de libre dont il disposait à son gré.
    J’enviais beaucoup Kiryl et surtout sa santé. Л ses yeux, j’é* ais un gringalet et il me le rap­pelait toujours sans faire preuve de trop de tact. Bien sûr, ses paroles et ses railleires m’offensai­ent, mais que faire contre la force?
    — J’en viendrai à bout de cinq comme toi, se vantait-il. Je peux te renverser d’un seul bras.
    11 ne mentait pas, ce Kiryl, un robuste gamin à joues roses.
    Parfois, quand nous patinions sur la rivière, Kiryl me proposait de faire une course. Il me donnait même un demi-kilomètre d’avance et il me rattrapait toujours. 11 glissait sur ses patins de bois ferrés à une vitesse vertigineuse, et, me rattrapant, il riaiat à gorge déployée. A ces mo­ments, je tâchais de me cacher pour que personne ne vît ma honte.
    III
    L’orgueil méprisant de Kiryl me fit chercher de nouveaux amis. J’en trouvai. C’étaient les livres. Le premier qui me tomba sous la main s’appelait «Fables et histoires vraies du ciel». Les fables ne m’étonnèrent point. Mon grand-père m’en avait raconté assez. Mon grand-père était un homme blanc, sec, toujours affairé. Il aimait à raisonner à propos de Dieu qui habitait au ciel, sur les frondaisons du paradis, où allaient après leur mort ceux qui avaient passé sur terre une
    vie sainte, sur l’enfer préparé à recevoir les pé­cheurs. Les fables de mon grand-père ne différai­ent point de celles que j’avais trouvées dans le livre.
    — Quand un être vient au monde, me disait mon grand-père, une étoile s’allume dans le c-iel; quand il meurt, elle tombe. Cette étoile est comme une chandelle. Il y a autant d’étoiles dans le ciel que d’hommes sur terre. Chacun naît sous sa planète qui le guide toute sa vie. Tous sont entre les mains de Dieu. Pas un cheveu ne peut tombe de la tête de l’homme si Dieu ne le veut.